La première chose qui frappe lorsqu'on est confronté à sa peinture, est son amour/passion pour la technique et les sciences anciennes. Cette connaissance donne à ce peintre les premiers ciments et briques qui servent d'éléments nourriciers à la trame de ses visions. N'ayant pas étudié l'art, le pratiquant en autodidacte de façon naturelle, on constate rapidement son talent de la composition et son ressenti instinctif de la nature de la couleur. Ses toiles, immensément colorées ne repaissent pas mais au contraire provoquent une soif curieuse. Nous avons vite de sentiment d'être plongé dans ses rêves, qui sait, son histoire.
Ses dessins, qui au premier regard, affichent une continuité d'Escher sans le copier, sont une extension vers d'autres horizons de ce grand graveur, une cartographie psychique des mondes qu'Escher n'a pu explorer ou a manqué de temps pour explorer. Ils sont d'une intense calligraphie, d'une immense précision, d'une originalité subite, d'un onirisme étrange. On plonge dans l'âme humaine, dans l'âme des objets, dans le ressenti de chaque rouage, dans une perspective parfois tordue, qui projette vers des mondes parallèles.
On est également frappé par le nombre de mondes, objets, ambiances, sur une seule toile, qui se chevauchent, se superposent, se lient, se relient dans une pyrotechnie de formes et de couleurs. Loin d'assommer, ils poussent à l'introspection, au désir de pénétrer la matière de façon quasi quantique. La peinture de Martine Laurens, je la qualifie naturellement de surréaliste, un surréalisme qui remonte à Chirico, opposant l'espace, le vide, les horizons clos, à la densité de la matière, ce d'une façon réellement magique. Elle pose et oppose ses rouges avec une sexualité crue et douce à la fois, évoquant, en premier jet, l'Obscénité de la Vie, et en second, l'angle d'idéalisation de celle-ci par l'esprit. Il en résulte une peinture vivante où on sent et entend les coeurs battre, les viscères gargouiller, les muscles transpirer, ce dans un immense tableau de la Vie et de l'Esprit.
Francis Lagneau - 2013